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  • la une du Courrier de l’Ouest est sur les abus sexuels dans l’Eglise le 5 octobre 2021

    Niort. Pédophilie dans l’église : le père Dupont attend le rapport « avec impatience et douleur »

    Après deux ans et demi de travaux, le rapport Sauvé sur les abus sexuels dans l’église catholique sera rendu public ce mardi 5 octobre. Pour le prêtre Julien Dupont, il est temps que la lumière soit faite.

    Il est aussi attendu que redouté. Après deux ans et demi de travaux, c’est ce mardi 5 octobre que sera dévoilé le rapport de la Commission indépendante sur les abus sexuels dans l’Église (Ciase) de 1950 à aujourd’hui. Nourries par des milliers de témoignages de victimes ou de proches, les 2 500 pages devraient mettre en lumière l’une des faces les plus sombres de l’institution ecclésiastique. Pour le père Julien Dupont, qui officie à Niort, Bessines et Magné, « il faut affronter le passé pour regarder devant ​ ».

    Dans quel état d’esprit êtes-vous avant la publication de ce rapport déjà présenté comme « accablant » ?

    Père Julien Dupont. « Je suis partagé comme vous pouvez vous en douter. D’un côté, j’attends avec impatience de pouvoir prendre connaissance des éléments. L’Eglise doit être une maison sûre et nous ne pouvons pas tolérer que de tels actes aient eu lieu. Un cas est toujours un cas de trop. Nous devons tout faire pour éviter de revivre ces situations. De l’autre, c’est avec une certaine douleur que je vais lire la synthèse car la réalité dépeinte sera très noire. Je ne peux avoir qu’une pensée appuyée et émue pour toutes les victimes. »

    L’Eglise a-t-elle trop tardé à ouvrir les yeux ?

    « C’est difficile de répondre. Personnellement, j’ai suivi mon séminaire entre 2001 et 2011 et il existait déjà des documents sur la lutte contre la pédophilie. Ce n’était pas un sujet tabou mais sans doute aurions-nous dû aller plus loin dans la démarche. Par exemple, je n’ai pas été formé au recueil de la parole pour des faits pédocriminels, qu’ils soient commis au sein de l’Eglise ou à l’extérieur. Pour moi, c’est un enjeu d’autant plus que je suis vicaire épiscopal en charge des jeunes du diocèse (Deux-Sèvres et Vienne). Aussi, avec la collaboration d’un pédopsychiatre, nous avons organisé une journée de formation avec des animateurs qui encadrent nos séjours à Lourdes. C’était très éclairant pour tout le monde. »

    « Des paroissiens se sont déjà ouverts à moi »

    Au cours de votre carrière, des croyants se sont-ils confiés à vous ?

    « Oui malheureusement. A l’image de ce que l’on observe dans la société avec la libération de la parole sur le harcèlement sexuel et le mouvement « Balance ton porc », des paroissiens se sont ouverts à moi. Uniquement des adultes pour des faits remontant à leur jeunesse. J’en ai moi-même accompagné deux jusqu’aux auditions de la commission. J’ai été au cœur du sujet. »

    Vous attendez-vous à ce que la publication du rapport déclenche une vague de témoignages ?
    « Je m’attends à tout. Si c’est le cas, ce sera très bien. Peu importe les faits, il est essentiel que les victimes puissent s’exprimer. Ceci dit, la Commission a instauré un système d’écoute et de messagerie depuis le lancement de ses investigations il y a trois ans. Ces canaux ont déjà été très sollicités et ils vont perdurer. »

    « Aux évêques comme au peuple chrétien de prendre ses responsabilités »

    Pensez-vous que la caisse de résonance médiatique attendue puisse raffermir les liens distendus entre l’Eglise et les citoyens ?

    « Je ne pense pas. Les gens les plus critiques le seront encore plus après ces révélations et les plus proches de nous y verront une vraie volonté de transparence. Le plus important, c’est que chacun prenne ses responsabilités : les évêques comme le peuple chrétien qui doit s’opposer aux postures déviantes, a fortiori quand il s’agit d’abus. C’est le message que j’ai adressé lors de la messe de dimanche. Compte tenu du contexte, il m’a paru évident de rappeler que nous étions à une époque charnière. La prière était le moment de la conscientisation. Place désormais au changement et aux actions concrètes. C’est aussi ce que j’attends de ce rapport. »