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  • Je suis très impressionné de m’adresser à toi.

    Jésus disait de toi (Mt 11, 11)

    que tu étais le plus grand parmi les hommes.

    Tu me fascines, comme tu as fasciné les foules venues te trouver dans le désert.

    Ta naissance mystérieuse

    Tout d’abord, l’annonce de ta naissance (Lc ch.1). Comme Sara (Isaac), Rachel (Joseph) ou Anne (Samuel), ta mère souffre de stérilité. Signe que tu seras grand comme eux pour que Dieu intervienne ainsi ? Le premier surpris est ton père Zacharie qui, pendant son service au Temple (il est prêtre à Jérusalem), reçoit la visite d’un messager divin qui lui annonce ta naissance et qui tu seras. Il ne veut pas le croire ; il est immédiatement puni : privé de la parole, il ne la retrouvera qu’au moment de ta naissance.

    Entre temps, le même messager (Gabriel) est envoyé auprès de Marie à Nazareth pour annoncer une autre naissance, celle de Jésus. Nous connaissons tous ce récit, et la suite, où les deux futures mères se rencontrent. Tu en es tout heureux. Ta mère Elisabeth sent que tu bouges en elle et, dans sa foi, elle y voit un signe de Dieu. Surprise aussi de la famille, des amis et des voisins au moment de ta naissance : ton père et ta mère veulent t’appeler Jean ; personne dans la parenté ne porte ce nom.

    C’est à ce moment que ton père retrouve la parole, et quelle parole ! Il prononce un magnifique psaume : quelle merveille que fait le Seigneur pour son peuple depuis Abraham jusqu’à maintenant, jusqu’à toi qui seras prophète du Très-Haut pour annoncer celui qui vient apporter le salut. Nous disons ce psaume à chaque prière du matin, pour dire que, à notre tour et chaque jour, nous voulons accueillir le salut que Dieu nous propose.

    Ta mission bien particulière

    Quel drôle de bonhomme tu es devenu ! (Mt 3, 1-12) Tu vis à la dure dans le désert, tu portes « un vêtement de poil de chameau, une ceinture de cuir autour des reins, te nourrissant de sauterelles et de miel sauvage ». Un tel accoutrement nous surprend, mais c’est ainsi qu’est apparu Elie (2 R 1, 8). Ne serais-tu pas Elie qui doit revenir ? Certains diraient que tu es une « grande gueule » ! Effectivement, l’Evangile te présente comme la « Voix » annoncée par le prophète Isaïe (Is 40, 3) et qui appelle à préparer le chemin du Seigneur.

    Disons que tu n’y vas pas de main morte : « Engeance de vipères, qui vous a appris à échapper à la colère qui vient ? ». Ton appel à la conversion est plutôt rude ! En tout cas, le peuple t’a entendu ; on vient à toi, une foule bigarrée, des collecteurs d’impôt, des militaires à qui tu indiques le bon chemin (Lc 3, 10-14). Certains ont voulu te rattacher aux Esséniens qui se retiraient eux aussi dans le désert (Qumran). Tu es bien différent ; toi, tu appelles tout le monde à la conversion ; pour eux, le salut est réservé à une élite.

    Des disciples se rassemblent autour de toi. Ils veulent écouter ta parole et vivre le chemin de pénitence que tu leur indiques, en particulier le jeûne (Mt 9, 14). Il y aura une certaine rivalité entre eux et ceux de Jésus. Pour ce qui te concerne, tu vas plutôt orienter les tiens vers lui. Cependant un certain nombre d’entre eux ont dû vivre de ta doctrine de façon indépendante puisqu’on en retrouve un à Ephèse, nommé Apollos, et qui deviendra chrétien grâce à deux disciples de Paul (Ac 18, 24-28). Comme quoi, les chemins qui mènent à Jésus peuvent être variés.

    Ta route croise celle de Jésus

    Les « Evangiles de l’Enfance » (Mt ch. 1 et 2 – Lc ch.1 et 2) t’ont fait croiser la route de Jésus avant ta naissance. Ce sera plus important encore au début de sa vie publique. Tu l’annonces en déclarant qu’il est bien plus grand que toi et que tu n’es pas « digne de lui ôter ses sandales » (Mt 3, 11). Ton baptême est un baptême d’eau pour amener à la conversion, tandis que le sien sera le baptême dans l’Esprit Saint. Et quand il viendra se faire baptiser à ton baptême, tu protesteras (Mt 3, 13-17). Tu découvriras qui il est, par la venue sur lui de l’Esprit Saint et par la voix venue du Ciel : « Celui-ci est mon Fils bien-aimé, celui qu’il m’a plu de choisir ».

    Dans l’évangile selon Jean, tu as beaucoup de place puisqu’on parle de toi dans le prologue (Jn 1, 6-8) mais ensuite, nous te voyons carrément passer le relais (Jn 1, 35-36). Tu vois passer Jésus et tu le présentes à deux de tes disciples : « Voici l’Agneau de Dieu ». Ils se mettent à suivre Jésus, passent la journée avec lui, deviennent ses premiers disciples et aussitôt se mettent à en recruter d’autres. Tu n’es pas jaloux. Tu as dit un peu plus tard : « Il faut qu’il grandisse et que moi, je diminue » (Jn 3, 28-30). Il est l’époux et toi, tu es l’ami de l’époux, et ta joie est parfaite.

    Dans cet évangile, tout paraît clair pour toi. Il n’en est pas de même dans Matthieu (11, 2). De ta prison (nous y reviendrons), tout se passe comme si tu avais oublié ce que tu avais dit auparavant. Tu fais demander à Jésus par tes disciples : « Es-tu celui qui doit venir, ou devons-nous en attendre un autre ? » Ne serait-ce pas tout simplement une manière pour l’auteur de faire dire à Jésus quels sont les signes de la venue du Messie : « Allez rapporter à Jean ce que vous entendez et voyez : les aveugles retrouvent la vue et les boiteux marchent droit, les lépreux sont purifiés et les sourds entendent, les morts ressuscitent et la Bonne Nouvelle est annoncée aux pauvres » ? Une fois de plus, tu remplis bien ton rôle : révéler à tous « celui qui doit venir ».

    Ta fin digne d’un prophète

    Décidément la comparaison avec Elie te colle à la peau. Il a dû subir la haine du roi Achab et de son épouse Jézabel. (Son histoire est racontée au 1er livre des Rois.) Il a pu s’en sortir, ce qui ne va pas être ton cas. Toi, c’est Hérode que tu dois affronter. Tu lui reproches d’avoir épousé la femme de son frère. Il te met en prison (Mc 6, 17-29), mais n’a pas trop l’intention de te faire mourir. Il vient même te voir et parler avec toi. Mais sa femme Hérodiade te poursuit de sa haine. Elle saisit la bonne occasion pour t’éliminer. Nous connaissons bien l’affaire : le banquet qu’Hérode organise pour son anniversaire, la fille d’Hérodiade qui danse devant lui, la promesse inconsidérée de lui donner ce qu’elle voudrait. Sur le conseil de sa mère elle demande ta tête sur un plateau. Il n’ose pas refuser et te fait décapiter dans ta prison.

    Prophète de l’Avent

    A la fin de cette lettre, je voudrais te dire combien nous te sommes reconnaissants. Tu as été fidèle à la mission qui t’avait été confiée : messager de celui dont tu disais (Jn 1, 30) : « Après moi vient un homme qui m’a devancé, parce que, avant moi, il était ! », tu as su t’effacer et orienter vers lui tes propres disciples. Nous aussi, d’une certaine façon, comme toi, nous sommes appelés, particulièrement en ce temps de l’Avent qui approche, à préparer pour nos frères le chemin vers Jésus et nous effacer devant lui.

    Que ton exemple nous encourage ! Merci, Jean !

    Joseph CHESSERON

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