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  • VI Les voyages de Paul ou, le Voyage de la Parole au vent de l’Esprit

    Qu’ils sont beaux, les pieds des messagers de bonnes nouvelles ! (Rm 10, 15)

    Une lecture, même superficielle des Actes des Apôtres, fait découvrir des gens en perpétuel déplacement. Nous parlerons ici plus spécialement des voyages de Paul, mais les autres acteurs se déplacent sans cesse.
    Pendant les sept premiers chapitres, tout se passe à Jérusalem. Mais le meurtre d’Etienne et la persécution contre la Communauté, loin de l’affaiblir, l’oblige à « sortir » et à essaimer. Philippe, l’un des Sept, se rend en Samarie et y annonce la Parole, puis, sur la route de Gaza, baptise l’intendant de la reine Candace, avant de se rendre à Césarée, au bord de la Méditerranée.
    On dit de Pierre (Ac 9, 32) qu’il se déplaçait continuellement. Nous l’avons vu (Blé qui Lève de juin) aller à Joppé puis à Césarée pour y accueillir dans l’Eglise le premier non-Juif, le centurion Corneille. Les voyages missionnaires de Pierre se terminent, pourrait-on dire, en queue de poisson (12, 17) : « … il s’en alla et se mit en route pour une autre destination. » L’auteur semble se désintéresser de ce que peut devenir Pierre. Ce qui est important pour lui, c’est que la Parole continue à circuler.

    Paul, voyageur infatigable (2 Co 11, 21-33)

    Le personnage de Paul occupe plus de la moitié du livre des Actes, un Paul toujours en déplacement, de lui-même ou contraint. Nous donnons ici l’itinéraire de ces voyages, que le lecteur pourra suivre sur la carte située en première page (Les provinces traversées sont mises entre crochets [ ] ; # = il est empêché par l’Esprit d’aller en Mysie et Bithynie)

    Voyage inaugural = Conversion – Vocation (9, 1-31)

    Jérusalem >> Damas >> Jérusalem >> Césarée >> Tarse

    1er voyage missionnaire = les premiers pas de la mission (ch. 13 et 14)

    Antioche (Syrie) >> Séleucie >> Chypre [Salamine°°>> Paphos] >> Pergé >> Antioche (de Pisidie) >> Iconium >> Lystre >> Derbé >> Lystre >> Iconium >> Antioche (P) >> Pergé >> Atalia >> Antioche (S)

    2ème voyage missionnaire = en direction des païens (15, 36-41 – 17 – 18,

    Antioche (S) >> [Syrie – Cilicie] >> Derbé >> Lystre >> [Phrygie – Galatie ] >> # [Mysie – Bithynie ] >> Troas >> Samothrace >> Néapolis >> Philippes >> Amphipolis >> Apollonie >> Thessalonique >> Bérée >> Athènes >> Corinthe >> Ephèse >> Césarée >> Antioche (S)

    3ème voyage missionnaire = la consolidation

    Antioche (S) >> [haut pays] >> Ephèse >> [Grèce – sans doute Corinthe] >> [Macédoine] >> Troas >> Milet >> Cos >> Rhodes >> Patara >> Tyr >> Césarée >> Jérusalem

    Voyage de la captivité, vers Rome = contre vents et marées, la Parole parvient « aux extrémités de la terre ».

    Jérusalem >> Césarée >> Sidon >> sous Chypre >> Myra >> Cnide >> Beaux Ports >> Lasée >> Malte >> Syracuse >> Reggio >> Pouzzoles >> Rome

    Paul a semé…(1Co 3, 6…)

    Le jeune Paul (Saul) part de Jérusalem pour aller à Damas faire prisonniers les croyants en Jésus. Le vieux Paul part de Jérusalem pour Rome, prisonnier au nom de Jésus. Entre ces deux départs, que de chemin parcouru ! Antioche de Syrie est la base de départ. Tout d’abord, Paul va porter la Parole en pays connu : il est de Tarse en Cilicie et les villes parcourues en ce premier voyage sont relativement proches. Il partira de là pour aller beaucoup plus loin, sur la côte ouest de l’Asie Mineure. Il y serait bien resté, mais l’Esprit l’appelle à franchir une nouvelle étape. C’est le songe de Troas (16, 6-10) : le monde grec l’attend, avec ses grandes villes, Philippes, Thessalonique, Athènes, Corinthe. Paul reste relativement peu de temps dans chaque lieu, juste le temps d’annoncer la Parole, de mettre en place et d’organiser les communautés des croyants. Les membres de ces communautés sont sans doute peu nombreux. A Philippes, par exemple, la Communauté d’origine juive se réunit dans la maison de Lydie (16, 15) ; celle d’origine grecque se réunit chez le gardien de prison converti (16, 34) : on loge peu de monde dans une maison individuelle, même vaste ; rien à voir avec nos églises d’aujourd’hui. Ces petites communautés sont comme des graines semées en terre qui deviendront de grands arbres.

    Il n’est pas un voyageur solitaire

    Paul et les autres ne voyagent pas seuls, exception faite peut-être de Philippe dont on ne connaît pas les compagnons. Pierre va avec Jean confirmer dans l’Esprit Saint la communauté de Samarie (8, 14). Il est accompagné de quelques frères pour aller chez Corneille (10, 23).

    Paul commence ses voyages missionnaires sous la direction de Barnabas (13, 3) mais, très vite, c’est lui qui, dans le récit, est nommé le premier. Au début du 2ème voyage, ils se sont brouillés (15, 36-39) et sont partis chacun de leur côté. Paul prend avec lui d’autres compagnons : Silas et Timothée. Nous en retrouvons des nouveaux au cours du 3ème voyage, des disciples venant de villes où Paul a fondé des communautés (20, 4). Pendant son voyage de la captivité vers Rome, il n’est pas seul : l’auteur laisserait entendre qu’il était du voyage (27, 1…). Quoiqu’il en soit, un groupe l’accompagne.

    Signification de ces récits de voyages

    On pourrait en rester à l’aspect anecdotique de ces voyages. On est alors surpris de la « disparition » de Pierre au niveau du récit (voir plus haut) et de la finale des Actes, étonnante pour ce maître du récit qu’est Luc : on ne sait pas ce que devient Paul ! Notre interrogation trouve sa réponse dans les deux derniers versets, peut-être même dans les deux derniers mots : « Paul vécut deux années entières à ses frais et il recevait tous ceux qui venaient le trouver, proclamant le Règne de Dieu et enseignant le Seigneur Jésus Christ avec une entière assurance et sans entraves ». En définitive, qui a voyagé grâce aux voyageurs Philippe, Pierre ou Paul, sinon la Parole et c’est elle qui est « sans entraves ».

    Par la suite, génération après génération, la Parole a voyagé et est parvenue « jusqu’aux extrémités de la terre » (Ac, 1-8), jusqu’à nous. Elle appelle d’autres « voyageurs » car elle ne peut voyager sans les hommes. Voyage au bout de la terre ou voyage jusqu’à la porte du voisin, ou même jusqu’à mon plus proche. Les Actes des Apôtres, c’est aujourd’hui qu’ils se continuent. Puissions-nous en être les acteurs, les voyageurs !

    Joseph CHESSERON