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  • Troisième conférence

     
    Introduction à la lecture du
    « Décret sur le ministère et la vie des prêtres »
    Du Concile Vatican II.
     
    Introduction :
     
    Les deux conférences précédentes, nous ont permis de voir comment le ministère et la vie des prêtres se sont enrichis et transformés au fil d’une histoire de trois siècles, riche en ruptures de tous ordres, tant politiques que sociales. Le profil du prêtre s’est modifié plus radicalement encore après les deux dernières guerres. Le prêtre apparaît plus proche des hommes ses frères et ses aspirations missionnaires l’entraine au-delà des frontières sociologiques ou géographiques. Nous allons aujourd’hui et, au cours des deux rencontres qui suivrons nous approprier le décret de Vatican II sur les prêtres et découvrir sur quels points il est redevable de ce passé.
     
    Le décret : « Le ministère et la vie des prêtres » au concile :
     
    Le décret conciliaire sur « le ministère et la vie des prêtres » a été voté, avec trois autres documents, le 7 décembre 1965, la veille de la clôture du Concile Vatican II, lors de la dernière séance de promulgation ! Il bénéficie, ainsi, des fruits de la longue maturation théologique des documents dogmatiques du deuxième concile du Vatican. La plupart des chapitres du décret ne peuvent être compris qu’en articulant leur lecture à celle des trois grands portiques du concile que sont les Constitutions Sacrosanctum Concilium (sur la liturgie), Dei Verbum (sur la Révélation) et Lumen Gentium (sur l’Église). Je donne la parole à un des acteurs du Décret Conciliaire sur la Vie et le Ministère des Prêtres, Monseigneur François Marty, alors Archevêque de Reims, Prélat de la Mission de France, qui deviendra, en mai 1968, Cardinal Archevêque de Paris. Il présidât la dernière Commission et en fut le rapporteur lors des discutions et de l’approbation.
     
    « Pourquoi ce décret a-t-il vu le jour si tardivement ? A lui seul, le hasard de la répartition des travaux ne l’explique pas. Pour en comprendre les raisons, il faut se reporter à l’histoire - on doit le dire, assez mouvementée - de ce document. Ce retour en arrière nous dévoile, en effet, que le décret sur les prêtres est, pour l’essentiel, un fruit du travail conciliaire lui-même et qu’il témoigne, à sa manière, des préoccupations dominantes qui ont animé Vatican II. Comment ne pas se réjouir de ce fait ? Lorsqu’on songe à la responsabilité qu’auront les prêtres du monde entier dans la mise en application de l’esprit et des décisions conciliaires, il était vraiment très important que le document les concernant puisse bénéficier, plus que d’autres, de l’aggiornamento réalisé par Vatican II.
    Quand, en juillet 1960, lut constituée la commission préparatoire de la discipline du clergé et du peuple chrétien, on lui donna pour tâche la rédaction de documents consacrés à des questions particulières, telles que la répartition du clergé, la sainteté des prêtres, les devoirs des curés, les offices et bénéfices ecclésiastiques, la cura animarum, les honoraires de messes, etc. Ce qui fit, au total, 17 schémas.
    En octobre 1962, le jeu des élections conciliaires renouvela pour une bonne part l’équipe de la commission préparatoire. Dès la fin de la première session du Concile, les responsables de la marche des travaux, dans le cadre général d’une réduction imposée par Jean XXIII, demandèrent à la nouvelle commission de la discipline du clergé et du peuple chrétien de réduire l’ampleur de sa contribution. Le schéma qui résulta de cette réduction ne vint pas en discussion à la deuxième session, et la lenteur des travaux conciliaires imposa une nouvelle contraction dont le principe fut décidé en février 1963. Du coup, notre commission se trouva dans l’obligation de réduire son schéma préparatoire à une série de propositions qui, devant l’assemblée, ne ferait l’objet que d’une courte discussion et d’un vote par placet, non placet et placet iuxta modum. Mais, quand, en octobre 1964, la série de propositions fut présentée à l’assemblée, celle-ci réagit assez vivement, et le débat se conclut par un vote négatif, qui rencontrait d’ailleurs le désir de la commission elle-même. L’assemblée demandait, sur les prêtres, un document conciliaire consistant, et qui soit élaboré dans une perspective de fond conforme à la « Constitution Dogmatique : Lumen gentium », dont on achevait à ce moment-là le vote en congrégation générale. Cette perspective devait témoigner largement des orientations pastorales de Vatican II, dont la prise de conscience devenait de plus en plus aiguë.
    Ce refus de l’assemblée de prendre en considération les « propositions » était lui-même un point d’aboutissement. Dès la deuxième session, au cours de la discussion du schéma sur l’Église, Plusieurs évêques avaient fait remarquer quele Concile parlait beaucoup des évêques, des diacres et des laïcs, mais pratiquement pas des prêtres. D’autres Pères rétorquaient, à juste titre, que si le sacerdoce ministériel, est dans l’Église une réalité fondamentalement une, ce qui était dit de l’épiscopat aurait nécessairement des prolongements au niveau du presbytérat. Mais, comme cela n’était pas évident pour tous, loin de là, il était souhaitable de s’exprimer plus longuement sur les prêtres. On commença par décider d améliorer les paragraphes qui leur étaient consacrés dans le schéma sur l’Église et le schéma sur la charge pastorale des évêques. Par ailleurs, à la fin de la deuxième session le texte d’un Message du Concile aux prêtres fut distribué aux Pères mais les propositions d’amendement furent si nombreuses qu’il fallut reporter à plus tard l’envoi d’un tel Message, dont l’initiative avait certainement été approuvée par Paul VI. En fait, ce Message devint inutile lorsqu’en octobre 1964 la décision fut prise d’abandonner les « propositions » et de mettre en chantier un schéma sur les prêtres.
    Dès la fin de ce mois d’octobre 1964, la commission se remit à l’ouvrage et elle confia à une nouvelle sous-commission d’experts le soin de préparer le schéma, d’un « Décret sur le ministère et la vie des prêtres ». Il s’agissait bel et bien d’une refonte complète du contenu des « propositions », dont on veilla à conserver quelques questions particulières tels, la répartition des prêtres, le souci des vocations sacerdotales, etc., mais le tout étant replacé dans un cadre de réflexion et d’analyse beaucoup plus vaste. Du point de vue doctrinal, le schéma sur l’Église fournit les orientations essentielles, mais la commission eut vite conscience qu’en les élaborant plus longuement elle en dévoilait davantage les richesses. La rédaction du schéma fut remise aux Pères avant la fin de la troisième session, c’est-à-dire avant le 21 novembre 1964.
    Les réactions des Pères durant l’intersession furent nombreuses et le texte, modifié en conséquence, fut approuvé par la commission lors de sa réunion d’avril 1965, à Rome.
    C’est ce texte modifié – que d’aucuns jugèrent moins bon que le précédent – qui vint en discussion devant l’assemblée en octobre 1965. Il fut accepté comme base de l’élaboration définitive, mais sur de nombreux points les Pères le jugèrent insatisfaisant et demandèrent une refonte assez profonde. Plusieurs épiscopats, entre autres l’épiscopat français, proposèrent même de véritables dossiers d’emendationes, qui rendirent le plus grand service à la sous-commission d’experts. Au point où en était le Concile, il fallait s’attendre à ce que le débat conciliaire révélât clairement deux conceptions du sacerdoce des prêtres assez divergentes : les Pères qui étaient particulièrement sensibles à la finalité pastorale et missionnaire du Concile comme aux aspirations de nombreux prêtres actuels souhaitaient vivement que, dans le schéma, le prêtre apparaisse avant tout comme l’homme de l’évangélisation ! Mais d’autres Pères craignirent qu’une telle insistance en vînt à masquer les valeurs les plus traditionnelles du sacerdoce, et en particulier tout son aspect théocentrique d’adoration du Père. La sous-commission se trouva donc devant la tâche difficile de concilier les deux points de vue qui s’étaient exprimés dans l’aula, en ne sacrifiant rien, ni d’un côté ni de l’autre. Le texte qui résulta de cette dernière refonte fut jugé très supérieur aux précédents : il reçut un très large accueil des Pères. Ceux-ci proposèrent néanmoins de nombreux modi (Plus de 10000 en tout), soit pour améliorer encore le texte, soit massivement en relation à quelques points précis sur lesquels nous aurons l’occasion de revenir plus loin. Le texte définitif revint, enfin, devant l’assemblée le 2 décembre 1965, où il reçut une approbation quasi unanime (11 non placet seulement dans le vote sur le schéma dans son entier). Le jour de la promulgation, le 7 décembre, Il n’y eut que 4 non placet. » [1]
     
     

     

     
    Plan du décret conciliaire :
     
    Préambule.
    Chapitre I : Le presbytérat dans la mission de l’Église.
    2. La nature du presbytérat
    3. Condition des prêtres dans le monde
    Chapitre II : Le ministère des prêtres.
    I – Fonctions des prêtres
    4. Les prêtres, ministres de la Parole de Dieu.
    5. Les prêtres, ministres des sacrements et de l’Eucharistie
    6. Les prêtres, chefs du peuple de Dieu
    II – Relations des prêtres avec les autres hommes
    7. Relations entre les évêques et le presbyterium.
    8. Union fraternelle et coopération entre prêtres
    9. Vie des prêtres avec les laïcs
    III – Répartition des prêtres et vocations sacerdotales
    10. La répartition des prêtres
    11. Le souci des prêtres pour les vocations sacerdotales
    Chapitre III : La vie des prêtres.
    I – Vocation des prêtres à la perfection.
    12. Vocation des prêtres à la sainteté
    13. L’exercice de la triple fonction sacerdotale
    Exige et en même temps favorise la sainteté.
    14. Unité et harmonie de la vie des prêtres.
    II - Exigences spirituelles particulières dans la vie des prêtres
    15. Humilité et obéissance
    16. Choisir le célibat et le considérer comme un don.
    17. Attitude à l’égard du monde et des biens terrestres.
    Pauvreté volontaire.
    III - Moyens divers au service de la vie des prêtres
    18. Moyens pour le développement de la vie spirituelle
    19. Étude et science pastorale
    20. La juste rémunération à assurer aux prêtres.
    21. Constitution de caisses communes
    et organisation de la sécurité sociale pour les prêtres.
    Conclusion.

     

     
     
     
    Lecture du Décret sur le ministère et la vie des prêtres :
     
    PREAMBULE
     
    1 Plusieurs fois déjà, ce saint Concile a rappelé à tous l’importance de l’Ordre des prêtres dans l’Église (1). Cet Ordre joue, dans le renouveau de l’Église du Christ, un rôle essentiel, mais aussi de plus en plus difficile : d’où l’utilité de ce décret qui parle des prêtres de manière plus détaillée et plus approfondie. Il concerne tous les prêtres, spécialement ceux qui exercent une charge pastorale ; en ce qui concerne les prêtres religieux, on fera les adaptations qui s’imposent. Par l’ordination et la mission reçues des évêques, les prêtres sont mis au service du Christ Docteur, Prêtre et Roi ; ils participent à son ministère, qui, de jour en jour, construit ici-bas l’Église pour qu’elle soit peuple de Dieu, Corps du Christ, Temple du Saint-Esprit. Dans une situation pastorale et humaine qui souvent a subi de profonds changements, il fallait les aider plus efficacement dans leur ministère et mieux prendre en charge leur vie. C’est pourquoi ce saint Concile déclare et décide ce qui suit.
     
    CHAPITRE PREMIER
    LE PRESBYTERAT DANS LA MISSION DE L’EGLISE
     
     (Nature du presbytérat)
     
    2 Le Seigneur Jésus, « que le Père a sanctifié et envoyé dans le monde  » (Jn. 10,36), fait participer tout son Corps mystique à l’onction de l’Esprit qu’il a reçue (1) : en lui, tous les chrétiens deviennent un sacerdoce saint et royal offrant des sacrifices spirituels à Dieu par Jésus-Christ, et proclament les hauts faits de celui qui les a appelés des ténèbres à son admirable lumière (2). Il n’y a donc aucun membre qui n’ait sa part dans la mission du Corps tout entier ; chacun d’eux doit sanctifier Jésus dans son cœur (3) et rendre témoignage à Jésus par l’Esprit de prophétie (4).
    Mais le même Seigneur, voulant faire des chrétiens un seul corps, où « tous les membres n’ont pas la même fonction » (Rom. 12,4), a établi parmi eux des ministres qui, dans la communauté des chrétiens, seraient investis par l’Ordre du pouvoir sacré d’offrir le Sacrifice et de remettre les péchés (5), et y exerceraient publiquement pour les hommes au nom du Christ la fonction sacerdotale. C’est ainsi que le Christ a envoyé ses apôtres eux-mêmes, il a fait participer à sa consécration et à sa mission les évêques, leurs successeurs (7), dont la fonction ministérielle a été transmise aux prêtres à un degré subordonné (8) : ceux-ci sont donc établis dans l’Ordre du presbytérat pour être les coopérateurs de l’ordre épiscopal (9) dans l’accomplissement de la mission apostolique confiée par le Christ.
    La fonction des prêtres, en tant qu’elle est unie à l’Ordre épiscopal, participe à l’autorité par laquelle le Christ construit, sanctifie et gouverne son Corps. C’est pourquoi le sacerdoce des prêtres, s’il suppose les sacrements de l’initiation chrétienne, est cependant conféré au moyen du sacrement particulier qui, par l’onction du Saint-Esprit, les marque d’un caractère spécial, et les configure ainsi au Christ Prêtre pour les rendre capables d’agir au nom du Christ Tête en personne (10).
    Participant, pour leur part, à la fonction des apôtres, les prêtres reçoivent de Dieu la grâce qui les fait ministres du Christ Jésus auprès des nations, assurant le service sacré de l’Évangile, pour que les nations deviennent une offrande agréable, sanctifiée par l’Esprit-Saint (11). En effet, l’annonce apostolique de l’Évangile convoque et rassemble le peuple de Dieu, afin que tous les membres de ce peuple, étant sanctifiés par l’Esprit-Saint, s’offrent eux-mêmes en « victime vivante, sainte, agréable à Dieu » (Rom.12, 1).
    Mais c’est par le ministère des prêtres que se consomme le sacrifice spirituel des chrétiens, en union avec le sacrifice du Christ, unique Médiateur, offert au nom de toute l’Église dans l’Eucharistie par les mains des prêtres, de manière non sanglante et sacramentelle, jusqu’à ce que vienne le Seigneur lui-même (12). C’est là qu’aboutit leur ministère, c’est là qu’il trouve son accomplissement : commençant par l’annonce de l’Évangile, il tire sa force et sa puissance du Sacrifice du Christ et il aboutit à ce que « la Cité rachetée tout entière, c’est-à-dire la société et l’assemblée des saints, soit offerte à Dieu comme un sacrifice universel par le Grand Prêtre qui est allé jusqu’à s’offrir pour nous dans sa Passion, pour faire de nous le Corps d’une aussi grande Tête » (13).
    Ainsi donc, la fin que les prêtres poursuivent dans leur ministère et dans leur vie, c’est de rendre gloire à Dieu le Père dans le Christ. Et cette gloire, c’est l’accueil, conscient, libre et reconnaissant, des hommes à l’œuvre de Dieu accomplie dans le Christ ; c’est le rayonnement de cette œuvre à travers toute leur vie. Ainsi, dans les temps de prière et d’adoration comme dans l’annonce de la Parole, dans l’offrande du sacrifice eucharistique et d’administration des autres sacrements comme dans les différents ministères exercés au service des hommes, les prêtres contribuent à la fois à faire grandir la gloire de Dieu et à faire avancer les hommes dans la vie divine. Tout cela découle de la Pâque du Christ, tout cela s’achèvera dans le retour glorieux du Seigneur, quand il remettra la royauté à Dieu le Père (14).
     
     (Condition des prêtres dans le monde)
     
    3 « Pris du milieu des hommes et établis en faveur des hommes, dans leurs relations avec Dieu, afin d’offrir des dons et des sacrifices pour les péchés » (15), les prêtres vivent avec les autres hommes comme des frères. C’est ce qu’a fait le Seigneur Jésus : Fils de Dieu, Homme envoyé aux hommes par le Père, il a demeuré parmi nous et il a voulu devenir en tout semblable à ses frères, à l’exception cependant du péché (14). Et déjà, il a été imité par les saints apôtres : saint Paul, docteur des nations, « mis à part pour l’Évangile de Dieu » (Rom. 1,1), atteste qu’il s’est fait tout à tous afin de les sauver tous (17). Par leur vocation et leur ordination, les prêtres de la Nouvelle Alliance sont, d’une certaine manière, mis à part au sein du peuple de Dieu ; mais ce n’est pas pour être séparés de ce peuple, ni d’aucun homme quel qu’il soit. C’est pour être totalement consacrés à l’œuvre à laquelle le Seigneur les appelle (18). Ils ne pourraient être ministres du Christ s’ils n’étaient témoins et dispensateurs d’une vie autre que la vie terrestre, mais ils ne seraient pas non plus capables de servir les hommes s’ils restaient étrangers à leur existence et à leurs conditions de vie (19). Leur ministère même exige, à un titre particulier, qu’ils ne prennent pas modèle sur le monde présent (20) et, en même temps, il réclame qu’ils vivent dans ce monde au milieu des hommes, que, tels de bons pasteurs, ils connaissent leurs brebis et cherchent à amener celles qui ne sont pas de ce bercail, pour qu’elles aussi écoutent la voix du Christ, afin qu’il y ait un seul troupeau, un seul pasteur (21).
    Pour y parvenir, certaines qualités jouent un grand rôle, celle qu’on apprécie à juste titre dans les relations humaines, comme la bonté, la sincérité, la force morale, la persévérance, la passion pour la justice, la délicatesse, et d’autres qualités encore, celles que l’apôtre Paul recommande quand il dit : « Tout ce qu’il y a de vrai, d’honorable, tout ce qui est juste, pur, digne d’être aimé, tout ce qui est vertueux et digne d’éloges, faites-en l’objet de vos pensées ». (Phil. 4,8) (22).
     
    Commentaires :
    Nous ne pouvons reproduire tous les commentaires donnés, ligne après ligne, au cours de la lecture commentée de ce texte ! Nous nous contentons de reproduire les points essentiels à retenir.
    Comme dans une bonne rédaction (ou dissertation) le préambule introduit bien la démarche du texte et nous en donne un remarquable résumé des principaux axes de la réflexion ouverte par le décret sur le ministère et la vie des prêtres.
    Les deux premiers alinéas (2 et 3) s’inspirent directement de la Constitution Lumen Gentium sur l’Église. Leur nouveauté est de commencer par décrire le sacerdoce commun des baptisés comme source du sacerdoce ministériel. L’Église tout entière est un peuple sacerdotal, vouée au culte spirituel en Jésus-Christ et appelée à annoncer l’Évangile à tous les hommes. Mais pour que ce ministère puisse s’accomplir, le Christ appelle et envoie « des ministres » qui accomplisse ce service en son nom pour l’Église. « Avec vous je suis Chrétien, pour vous je suis évêque » affirmait St Augustin ! Le sacerdoce des membres de l’Église est fondé sur les sacrements de l’initiation chrétienne, mais le sacerdoce ministériel requiert une nouvelle intervention sacramentelle, celle de l’ordre, qui configure certains de ses membres au Christ Prêtre, de telle sorte qu’il puisse « agir au nom du Christ Tête, en personne ».
    On sent le tension entre les deux courants conciliaires, ceux qui se veulent fidèles au Concile de Trente insistant davantage sur le caractère sacré du prêtre « investi du pouvoir sacré d’offrir le sacrifice et de remettre les péchés ». Et l’autre courant qui intègre davantage les acquis des siècles précédents qui met en premier l’annonce de la Parole et la dimension missionnaire du ministère des prêtres. En ce sens les prêtres s’identifient davantage au ministère apostolique dont les évêques reçoivent le charisme lors de leur ordination. L’affirmation de ce lien entre « consécration » et « mission », et celle de l’unité organique du sacerdoce ministériel mérite d’être soulignée, c’est un trait que nous retrouverons dans l’ensemble du décret ! L’alinéa 3, souligne que les prêtres sont solidaires des hommes par leur humanité et leur baptême. Frères de tous aussi bien de ceux qui sont proches que ceux qui sont au loin, « Je me suis fais tout à tous afin d’en sauver quelques uns » nous dit St Paul ! Mais en même temps, le texte prend soin de souligner que le Christ les a mis à part pour le service de l’Évangile. Situation difficile, « il faut tenir, en même temps, les deux bouts de la chaine » éternelle tension entre une communion profonde en humanité et une séparation nécessaire pour la liberté de l’annonce de la Bonne Nouvelle jusqu’aux extrémités de la terre !
    Mais cette tension nous vient de la figure du Christ lui-même qui dans son incarnation est devenu semblable en tout à ses frères. Mais aussi, il a été mis à part pour accomplir sa mission messianique de salut. Il meurt hors de la ville, rejeté des hommes, élevé de terre, et ainsi il accomplit son sacrifice, grand prêtre, mis à part pour le salut du monde ! La fécondité du ministère des prêtres répond de modèle du Christ pasteur qui connait et prend soin de toutes ses brebis.
     
    Les deux prochaines conférences, celle 16 mars et celle du 23 mars, nous permettront de lire respectivement chacun des deux autres chapitres. Plus volumineux que le premier, ils nécessiteront d’opérer des choix pour dégager les articulations essentielles de ce texte si dense, afin de permettre un parcours qui voudrait être le plus complet possible !

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